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Lettre ouverte aux parlementaires

vendredi 17 janvier 2014

Alors que le projet de loi de Mme Cécile Duflot est discutée en seconde
lecture à l’Assemblée nationale, l’association HALEM, l’ANGVC et la
FNASAT-Gens du Voyage ont écrit collectivement aux parlementaires afin de les sensibiliser sur l’initiative envisagée par la loi ALUR d’une prise en
compte d’une diversité de modes d’habitat, notamment les résidences mobiles et démontables.

Le courrier a été adressé à ce jour à l’ensemble des député(e)s et sera
diffusé demain à l’ensemble des sénateur(trice)s.

Vous trouverez en PJ la copie de cette interpellation, pour information,
mais aussi pour que vous puissiez vous en saisir en ré-interpelant vos
sénateurs locaux. Par ailleurs, nous vous invitons à la communiquer sur vos sites Internet, réseaux sociaux, à vos partenaires.

lettre ouverte aux parlementaires

pour plus d’infos :

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Mesdames et Messieurs les députés,

Mesdames et Messieurs les sénateurs,

Paris le 14 janvier 2014

Alors que le projet de loi ALUR passe cette semaine en seconde lecture à l’Assemblée Nationale, nous, associations et fédérations engagées dans l’accompagnement et la défense des personnes vivant en résidences mobiles ou démontables, souhaitons exposer notre vision et nos attentes à l’ensemble des parlementaires qui auront la responsabilité de légiférer pour tenter de réduire le fossé séparant les occupants d’habitats mobiles ou démontables du droit au logement.

Qu’elles soient adoptées par défaut ou librement consenties et choisies, ces formes d’habitats légers et mobiles sont aujourd’hui la résidence principale et unique de plusieurs centaines de milliers de citoyens. Gens du voyage et occupants de résidences mobiles constituant leurs modes d’habitat permanent, ménages vivant en yourte/en tipis, personnes vivant à l’année dans des campings, dans des parcs résidentiels de loisirs ou sur des terrains privés n’autorisant pas
l’implantation d’habitat... Toutes ces situations sont méconnues des indicateurs statistiques du logement et non traitées par les politiques de lutte contre le mal-logement.

Nous n’ignorons pas les différences de statuts d’occupations, de choix du mode d’habiter, de parcours résidentiels, d’aspirations entre ces modes d’habitats et les ménages qu’elles concernent. De même, nous ne minorons aucunement les difficultés réglementaires, urbanistiques, environnementales, sociales ou politiques qu’elles peuvent poser dans certains cas aux collectivités.

Mais indépendamment des différences sur leurs appartenances sociales ou culturelles, ces ménages ont en commun d’être confrontés en raison de leur mode d’habiter à d’intolérables obstacles administratifs et techniques pour accéder aux droits (domiciliation, scolarisation, santé...) et aux services essentiels (raccordement à l’eau, à l’électricité, à l’assainissement). Elles subissent le même abandon de la part des politiques sociales de l’habitat. S’opère alors un cercle vicieux où la stigmatisation du mode d’habiter encourage sa répression, accentuant l’exclusion spatiale et sociale des individus vis-à-vis de la collectivité pour amplifier à nouveau la discrimination et relégation dans des espaces de non-droit...

L’article 59 initial de la loi ALUR visait d’abord à définir dans le code de l’urbanisme un régime d’installation et d’autorisation d’urbanisme pour les résidences démontables « constituant
l’habitat permanent de leurs usagers » sur les terrains en secteurs constructibles ou pouvant accueillir de l’habitat réversible... Au même titre que l’habitat permanent en résidence mobile, cet alinéa devait poser une base juridique pour appréhender l’installation des habitats démontables en les faisant entrer dans le droit commun des règles d’urbanisme.

Il consolidait ensuite les principes de cohésion sociale et de diversité de l’habitat dans les dispositions générales relatives aux documents de planification que sont les SCOT et les PLU en proposant que ces documents tiennent compte des besoins présent et futurs de « l’ensemble des modes d‘habitat ».

Il faut à ce sujet rappeler que 95 % des règlements de PLU communaux français sont entachés d’illégalité au regard de la loi SRU en interdisant de manière stricte et absolue l’installation de résidences mobiles sur l’ensemble de leur territoire. Qu’ils soient propriétaires de terrains constructibles ou non, les intéressés s’exposent irrémédiablement, par le simple fait de l’installation, à une infraction. En réalité ce ne sont pas tant les pratiques, ni les comportements
résidentiels des occupants de résidence mobile/ démontables qui provoquent de l’habitat précaire et informel mais bien le contexte de non droit qui contraint ces ménages à choisir entre le renoncement ou l’illégalité de leur mode d’habitat.

Soumis au vote et finalement supprimé en première lecture au Sénat, cet article 59 a donné lieu à des débats caricaturaux, étalages de fantasmes et d’incantations sur le risque de développement anarchique d’habitats « exotiques », de « bidonvilles » en place de lotissements, de
« communautarisation du droit des sols »... Discussions déconnectées d’abord de l’objet de l’article 59 : apporter des réponses au mal-logement des personnes touchées par l’arbitraire que permet le
vide juridique en matière d’habitat démontable et mobile de résidence (contrairement à l’habitat léger et mobile de loisirs dument codifié)... Déconnectées ensuite de la réalité de terrain des élus locaux qui, d’une part sont conscients des larges pouvoirs de police dont ils disposent en matière d’urbanisme pour contrôler/prévenir/sanctionner les éventuelles infractions aux règlements nationaux et locaux mais qui surtout, pour la majorité d’entre eux, cherchent à remédier aux difficultés d’habitat et à l’insécurité juridique de leurs administrés vivant en résidence mobile ou
démontable. Ces élus, à l’instar des opérateurs du logement d’insertion, ont besoin d’un cadre juridique précis et adapté, d’ingénierie et d’outils techniques pertinents pour élaborer des réponses durables, équitables, adaptées aux capacités et besoins des ménages.

Oui, Madame la Ministre du Logement avait raison de voir en la suppression de cet article un maintien du statu quo, laissant les élus locaux dans la difficulté sur le terrain ! Oui, inscrire progressivement ces formes d’habitat dans le droit de l’urbanisme, mais plus encore à terme dans celui de la construction et de l’habitation, est le seul moyen d’encadrer et de prévenir le développement anarchique que redoutent les détracteurs de l’habitat mobile ou démontable.

Cessons de voir ces modes d’habiter comme des palliatifs de second choix à la crise du logement qui frappe notre pays, et considérons les à leur juste valeur comme des choix présentant
des caractères rationnels, relationnels et innovants sur les plans économiques, écologiques, sociaux, culturels dans les territoires où ils sont développés. Nous appelons donc le gouvernement et l’ensemble des parlementaires à réintroduire cet article 59 et à faire preuve de réalisme afin d’amorcer, dans un premier temps par l’urbanisme, un traitement plus équitable de ces modes d’habiter.

Car si l’urbanisme est un début de réponse nécessaire, son apport restera sans effets s’il n’est pas suivi d’une réflexion plus intégrée pour enfin prendre en compte l’habitat diversifié dans les politiques de logement, pour définir un cadre réglementaire et technique à ces habitations, pour sécuriser les parcours de vie de leurs usagers et leur garantir des conditions égales d’accès aux droits humains fondamentaux.

Vous l’aurez compris, Madame, Monsieur, le/la député(e), Madame, Monsieur le/la sénateur(trice), il nous semble indispensable de tout mettre en œuvre pour que changent les regards sur l’habitat diversifié, et pour que le droit au logement s’applique au plus grand nombre.
Aussi, nous souhaiterions que les préoccupations que nous avons exposées soient relayées dans les débats parlementaires et à cette fin, nous restons à votre disposition pour poursuivre la réflexion.

Confiant de l’intérêt que vous porterez à ce courrier, veuillez recevoir, Madame, Monsieur, le/la député(e), Madame, Monsieur le/ la sénateur(trice), nos salutations distinguées.

Les associations signataires

FNASAT  : Fédération Nationale des Associations Solidaires d’Action avec les Tsiganes et Gens du voyage regroupe plus de 100 associations départementales ou régionales présentes dans 71 départements, en relation avec les services publics et les collectivités locales. Organisée en pôles de compétence, la FNASAT - Gens du voyage anime ce réseau d’associations impliquées pour l’accès aux droits et le rapprochement des populations, investissant des champs diversifiés : domiciliation, insertion sociale et professionnelle, scolarisation et parcours de scolarité, médiation juridique, habitat, promotion culturelle.

>>> 59 rue de l’Ourcq, 75019 Paris - Tél. : 01 40 35 00 04 / Fax : O1 40 35 12 40 - www.fnasat.asso.fr

ANGVC  : L’Association Nationale des Gens du Voyage Catholiques assure aux familles, lors de ses permanences juridiques, appui et conseil sur les bonnes pratiques à mettre en œuvre quant à leurs difficultés. Elle a notamment engagée une expertise depuis plusieurs années sur les questions d’habitat et d’urbanisme relatives aux résidences mobiles, habitat permanent de leurs utilisateurs, et a contribué activement par ses enquêtes à dresser des constats et à constituer une force de propositions pour les pouvoirs publics.

>>> 9-11 avenue Michelet – 93400 St Ouen – Tél. 01 82 02 60 13 / Fax. 09 74 44 55 06 – www.angvc.fr

HALEM : Association pour les HAbitant de Logements Éphémères ou Mobile. HALEM travaille en réseau avec une grande diversité d’acteurs concernés par l’Habitat Léger ou Mobile. Des usagers, des militants, des chercheurs de plusieurs di disciplines, des juristes, des urbanistes, des architectes, des associations... s’y réunissent pour alimenter l’analyse, faire des propositions et résister aux logiques de guichet afin d’aller vers du droit commun. Tout en ayant conscience de la diversité d’intérêts et de points de vue, HALEM possède la particularité de refuser de concentrer son action uniquement vers un public ciblé et travailler plutôt sur l’aspect léger et/ou évolutif des installations qui servent d’habitation principale à leurs occupants.

>>> Estrade le Bas, 09800 ARGEIN – Tél. : 06 18 94 75 16 - association[at]halemfrance.org – www.halemfrance.org

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